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Homme Culture & Identité

L' identité masculine mise en questions / Le genre et l'égalité entre les sexes / Blog animé par Alexis Aguettant

Mathieu Block-Côté : "L'escroquerie des nouveaux "sociologues""

Mathieu Block-Côté : « L'escroquerie des nouveaux « sociologues » »

Paru sur le Figarovox le 12/10/2018

Chronique – Deux universitaires et un journaliste américains ont mis en scène un canular pour dénoncer la dérive idéologique des sciences sociales qui appellent à en finir avec les privilèges de l'homme blanc hétérosexuel.

La semaine dernière ont apprenait que deux universitaires et un journaliste américains, exaspérés par la dérive idéologique des sciences sociales, avaient mis en scène un formidable canular pour révéler au grand public leur ineptie en publiant dans des revues reconnues des articles relevant du plus grand délire. Entre une étude sur la « culture du viol » chez les chiens et une autre en appelant à la lutte contre la transphobie en misant sur une réconciliation entre la masculinité hétérosexuelle et l'analité par l'utilisation de godemichés, les exemples poussaient à la rigolade. Ce canular rappelait celui monté par Alain Sokal à la fin des années 1990. Il avait berné une revue de grande réputation pour illustrer à quel point le postmodernisme relevait de la fraude intellectuelle en publiant un article dont le titre ubuesque mérite d'être rappeler : « Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformative de la gravitation quantique ».

 

Si le milieu de la sociologie académique est ébranlé, il fait tout pour minimiser la portée de la controverse, en dénonçant les auteurs du canular. Le problème serait de penser que nous sommes ici devant une ruse exceptionnelle qui aurait déjoué les rigoureux standards d'une science normalement irréprochable.Au contraire, si ces articles ont été encensés par les évaluateurs de revues prestigieuses, au point d'être souvent publiés, c'est parce qu'ils sont représentatifs de ce qu'est devenue la sociologie. Derrière un langage ésotérique à prétention scientifique, on trouve platement un discours militant qui carbure à la haine de l'homme blanc hétérosexuel. Il s'agit, chaque fois, d'en appeler à en finir avec lui et ses privilèges. Dans ce milieu existe une prime à la radicalité. Parmi les « études » réalisées dans le cadre de ce canular, on en trouvait une qui envisageait la possibilité de persécuter physiquement les garçons blancs à l'école en les enchaînant sur le sol, pour corriger certaines « inégalités épistémiques » !

 

Cette sociologie militante présente la civilisation occidentale à la manière d'un enchevêtrement de systèmes discriminatoires fonctionnant à l'exclusion de tous ceux qui s'écartent de la norme blanche et mâle. Il s'agit d'une sociologie victimaire prétendant décrire la société avec les yeux de ceux qui seraient marginalisés, ce qui peut aller jusqu'à la valorisation de la délinquance. On dénonce rituellement le racisme, le sexisme, mais aussi l' « hétérosexisme » (système discriminatoire constituant l'hétérosexualité en norme sociale), le « capacitisme » (système discriminatoire au désavantage des handicapés, et posant comme norme le fait de ne pas l'être) et bien d'autres systèmes fantasmés. L'ordre social serait une construction strictement artificielle qu'une bonne lunette théorique permettrait de rendre transparente pour mieux la démonter et ensuite la remonter, en suivant une maquette diversitaire. Dans cette mouvance, la théorie du genre passe pour une nouvelle évidence puisqu'elle vient abolir toute emprise de la nature sur la culture. Le sociologue patenté se sent ainsi tout-puissant : lui seul voit dans la société dans son ensemble, et il se permet de surplomber le commun des mortels étrangers à sa science. Faut-il se surprendre qu'il ait souvent l'air d'un cuistre ?

 

Cette sociologie est hégémonique dans l'université, surtout lorsqu'elle se réclame de l'antiracisme et du féminisme, ce qui fait penser aux années de gloire du marxisme académique qui prétendait lui aussi conjuguer l'esprit scientifique et la critique sociale radicale. Son paradigme domine la recherche et est relayé par des médias complaisants qui espèrent maquiller derrière un langage scientifique leur parti pris idéologique. Qui ne s'y plie pas a peu de chance d'y faire carrière. Il sera laissé aux marges de l'institution, à la manière d'un intellectuel égaré, décrété non scientifique et probablement suspect. On aurait tort de sous-estimer le fanatisme et l'influence de cette entreprise militante qui a usurpé la belle référence à la sociologie au point de faire de ce mot un repoussoir chez ceux qui n'en peuvent plus du politiquement correct.

 

Mais le projet inaugural des sciences sociales demeure intact : permettre à l'homme de comprendre les dynamiques sociales. C'était celui de Durkheim, de Pareto, et plus tard de Raymond Aron, de Julien Freund ou de Raymond Boudon. On pourrait en nommer d'autres en portant notre regard sur l'ensemble des sciences humaines. Tous n'appréhendaient pas la société de la même manière mais nous ont permis de mieux l'analyser. Et ce sont des intellectuels comme Marcel Gauchet, Pierre Manent, Pierre-André Taguieff, Dominique Schnapper ou Chantal Delsol qui leur sont le mieux fidèles, bien davantage que les figures consacrées de la sociologie officielle. Faut-il se surprendre qu'ils soient si souvent visés par nos nouveaux « sociologues » ?

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